11 ans de services hospitaliers, ça use. Travailler les jours fériés, les week-end, à Noël, en horaires décalées, faire des remplacements impromptus dans d'autres services mais aussi être confronté à la douleur, à la mort, aux incivilités, à des choix thérapeutiques non acceptables,... voilà ce qu'était devenu mon quotidien. Voilà ce qui m'a poussé à changer et à partir. Mais partir pour quoi faire, pour aller où ?
Devenir infirmier au départ, c'est forcément pour travailler à l'hôpital pour faire de la technique et avoir du relationnel avec les patients. C'est l'essence même de notre métier (vous avez déjà vu des petits soldats partir pour la chasse ?). On est formé pour ça. Alors quand les années défilent que vous avez acquis une bonne technique, que vous avez trouvé votre distance relationnelle, qu'en gage de reconnaissance on vous demande d'être tuteur des étudiants infirmiers voire d'aller dispenser des cours à l'IFSI, à un moment, on a envie de changer d'horizons. Pour moi, le simple fait de changer de service ne me donnait pas satisfactions. J'ai donc commencé à lever mes yeux pour regarder ce qui se faisait. Faire l'école des cadres ? ça me demandait trop d'investissement personnel que je ne pouvais pas donner. Partir dans le privé pour faire du commercial et vendre des produits de santé "vous manquez de prestance". Infirmier coordinateur en résidence pour personnes âgées ? "z'êtes trop jeunes et vous manquez d'expérience"... Enchainer les entretiens et les tests de personnalité dans les entreprises, les cabinets de recrutement et les maisons de retraite, passer des heures sur le net pour déposer son cv et dénicher des annonces et essuyer des refus consécutifs, on souffre dans l'âme. Mais alors je ne serais pas si bon que ça ? Ba t'es juste bon dans ce que tu faisais et pas assez dans ce que tu vises !
Et puis un jour, la veille de partir 1 semaine au ski, je trouve une annonce pour un poste en médecine du travail. Allez, après tout, un clic, ça coute rien. De toute façon la réponse sera probablement négative comme les autres. Moi, j'y connais rien en médecine du travail.
Une semaine plus tard, je trouve la réponse dans ma boîte mail : demande de rdv pour un entretien. Allez hop, c'est reparti pour un tour. Rencontre avec le médecin du travail de l'entreprise et l'infirmière qui, visiblement emballées par mes motivations et mes objectifs (retravaillés spécialement pour ce poste là. Ba oui, mon but ne sera pas de manager une équipe ni de vendre x VAC par mois), m'envoient rencontrer la Responsable des Ressources Humaines. Quelques questions plus tard et un entretien plutôt sympa, me voilà devenu infirmier en médecine du travail.
Mais au fait, qu'est ce que ça fait au juste un infirmier en médecine du travail ? Je ne savais pas trop mais je savais que j'allais pouvoir savourer mes week-end et avoir des horaires de travail "comme tout le monde".
Pour ne pas arriver complètement largué, j'ai surfé sur le net pour glaner le plus d'infos possibles et j'avais demandé à venir 1 semaine pour que l'infirmière me montre ce qu'elle faisait.
Jour J : c'est dur de repartir à 0. C'est tellement différent de ce que j'avais vu et appris. Aucune formation à l'IFSI pour ce domaine. Pas de collègue à qui demander de m'en parler. Bref, livré à moi-même... enfin pas tant que ça, car mon médecin du travail et son assistante allaient sacrément m'aider et me former.